L’absence d’entretien est une cause d’annulation de la convention de rupture, mais c’est à celui qui invoque cette cause d’en établir l’existence.

 

Arrêt de la chambre sociale de la Cour de cassation du 1er décembre 2016 (pourvoi n° 15-21.609)

 

 

Les faits :

 

Un employeur et un salarié concluent une rupture conventionnelle.

Le formulaire de rupture précise qu’il y a eu un entretien préalable.

Il est homologué tacitement par l’Inspection du Travail.

Le salarié a par la suite saisi le Conseil de prud’hommes, invoquant la nullité de la rupture conventionnelle pour cause d’absence d’entretien préalable.

Le Conseil de prud’hommes puis la Cour d’appel lui donnent raison au motif que l’employeur n’a pas rapporté la preuve de l’existence d’un entretien préalable.

La Cour de cassation casse l’arrêt de la Cour d’Appel au motif qu’il appartient à celui qui invoque une cause de nullité (en l’espèce le salarié) d’en établir l’existence.

 

 

Commentaire :

 

* La décision de la Cour de cassation rappelle d’abord sans surprise la règle selon laquelle la rupture conventionnelle d’un contrat de travail ne peut valablement intervenir qu’après un ou plusieurs entretiens entre l’employeur et le salarié, en application de l’article L 1237-12 du code du travail.

Ce texte ne précise pas combien d’entretiens sont nécessaires mais il est admis tant par l’Inspection du travail qui doit homologuer la rupture que par les juridictions prud’homales qu’un seul entretien suffit.

Si un entretien suffit, un entretien est en revanche nécessaire sous peine de nullité de la rupture conventionnelle.

Cette formalité procédurale a été prévue pour garantir la liberté de consentement du salarié.

 

* La seconde partie de l’arrêt commenté est plus surprenante, la Cour de cassation jugeant que c’est à celui qui invoque l’absence d’entretien (qui en pratique sera le salarié) de rapporter la preuve de ce manquement.

S’il existe une règle générale selon laquelle c’est à celui qui invoque une nullité d’établir l’existence de la cause susceptible d’entraîner l’annulation de la convention, il existe une autre règle tout aussi connue selon laquelle il n’est pas possible de rapporter une preuve négative.

Or, il est difficile voire impossible de prouver qu’un entretien n’a pas eu lieu.

En réalité, la Cour de cassation a refusé de mettre à la charge de l’employeur l’obligation – non prévue par les textes – de rapporter la preuve de l’existence de l’entretien préalable alors qu’il n’existe aucune obligation de convocation.

Ainsi, la mention dans le formulaire de rupture d’une date d’entretien fait présumer la réalisation effective d’un entretien préalable.

Les décisions de la chambre sociale de la Cour de cassation n’étant pas souvent favorable aux employeurs, celle-ci méritait bien quelques commentaires.

 

 

Les conseils du professionnel :

 

L’employeur a tout intérêt à mentionner une date d’entretien dans le formulaire de rupture.

Par ailleurs, pour éviter d’autre contestation, il lui est aussi conseillé d’inviter le salarié qui accepte la rupture conventionnelle de ne pas signer le formulaire de rupture le même jour que l’entretien, ce pour lui permettre de prendre le temps de la réflexion et le cas échéant de se faire conseiller.

De son côté, le salarié a intérêt à relire attentivement l’ensemble du formulaire de rupture et pas seulement la partie mentionnant l’indemnité de rupture.

Dans l’hypothèse où aucun entretien n’aurait eu lieu, il lui faudra demander à l’employeur de modifier le formulaire qui mentionne une date d’entretien et à défaut de modification, il devra refuser de signer le formulaire présenté.

 

 

Loïc DEMAREST