Le droit du travail s’adapte à la crise sanitaire actuelle qui génère de nombreuses questions.

L’une d’entre elles concerne la rupture du contrat de travail.

 

 

1/  le cas du CDD

 

Le CDD peut être rompu de manière anticipée uniquement dans les cas strictement énumérés par la loi.

Ces cas sont les suivants :

  • rupture pendant la période d’essai s’il en a été prévu une dans le contrat
  • accord entre l’employeur et le salarié
  • demande du salarié qui justifie d’une embauche sous CDI
  • faute grave
  • inaptitude constatée par le médecin du travail
  • force majeure.

 

La force majeure est très rarement utilisée pour justifier la rupture d’un CDD parce qu’en matière sociale, elle est appréciée de manière très stricte par les juges.

L’épidémie de la grippe H1N1 n’avait pas été reconnue à l’époque comme constituant un cas de force majeure.

Néanmoins, le COVID 19 constitue non pas une épidémie mais une pandémie mondiale qui a entraîné l’arrêt de toutes les activités non essentielles dès lors qu’il n’est pas possible de mette en œuvre le télétravail.

Les conséquences de la grippe H1N1 avaient été beaucoup moins importantes.

Aujourd’hui et pour une durée encore indéterminée, les commerçants (non alimentaires), coiffeurs et autres professionnels travaillant avec une clientèle qui se rend dans leur boutique sont fermés ; ils n’ont plus d’activité et n’encaissent ainsi plus de chiffre d’affaires.

Les conditions de la force majeure pourraient donc être réunies.

 

Cela étant, le recours au chômage partiel, y compris pour les salariés en CDD, a été facilité et étendu.

Il permet à l’employeur de ne pas avoir à supporter le salaire pendant la période d’arrêt de son activité, sous réserve toutefois du délai d’indemnisation par l’Etat qui pourrait avoir un impact sur les trésoreries des entreprises s’il était trop long.

Néanmoins, dès lors qu’il est possible de recourir au chômage partiel, la condition d’irrésistibilité de la force majeure risque de ne pas être retenue.

En conséquence, le risque que la rupture d’un CDD pour force majeure soit considérée comme abusive est relativement important.

Il convient de rappeler que la rupture non justifiée d’un CDD oblige l’employeur à supporter les salaires restant à courir jusqu’au terme du contrat.

 

Il est donc conseillé en l’état de ne pas invoquer la force majeure pour rompre un CDD de manière anticipée, étant toutefois souligné qu’en fonction de l’évolution de la situation cet avis pourrait être revu.

 

 

2/  le cas du CDI

 

Le CDI peut être rompu à tout moment dans les cas suivants :

  • rupture de la période d’essai lorsqu’il en a été prévu une dans le contrat
  • rupture conventionnelle qui suppose un accord entre l’employeur et le salarié et une absence d’opposition de la DIRECCTE
  • démission du salarié

 

L’arrêt des activités et la perte de chiffre d’affaires en découlant pourraient entraîner des difficultés économiques justifiant un licenciement.

Dans les textes actuels, rien n’oblige l’employeur à recourir à l’activité partielle pour ne pas procéder à des licenciements économiques.

L’invitation du gouvernement à ne pas licencier n’est pas susceptible d’avoir le moindre effet juridique.

En droit, dès lors que les difficultés économiques sont avérées et que la procédure est respectée (la consultation des représentants du personnel devra notamment respecter les mesures sanitaires de confinement et de distanciation sociale), le licenciement économique ne peut être invalidé par un conseil de prud’hommes qui n’a pas à s’inférer dans la gestion par l’employeur de son entreprise.

Pour autant, s’il s’avère que le recours à l’activité partielle peut permettre d’éviter les licenciements économiques dès lors que dans ce cas les salaires font l’objet d’une indemnisation totale par l’Etat, le salarié licencié pourrait invoquer un abus de droit de l’employeur pour obtenir une indemnisation.

 

Pour éviter des contentieux, il est recommandé de ne pas procéder pour l’instant à des licenciements si toutes les mesures possibles permettant de faire face aux difficultés économiques rencontrées n’ont pas d’abord été mises en œuvre.

 

 

Loïc DEMAREST